Que nous soyons conditionnés, dès même avant la naissance, cela ne fait aucun doute. Mais cʼest à travers les jeux dʼenfant que les conditionnements se déploient de manière fulgurante.
Quʼil sʼagisse de lʼépée en bois dʼhier, aux jeux vidéos dʼaujourdʼhui, ce sont les mêmes valeurs qui apparaissent de manière récurrente.
Un jeu est caractérisé par un espace : le terrain de jeu aujourdʼhui, la vie sociale demain. Par un temps : la durée de la partie du jeux, le temps de travail ou social demain. Par un but : gagner … déjà et encore demain ! Et par des joueurs dont lʼun doit gagner aujourdʼhui, et demain ce seront des concurrents voire des adversaires à battre ou éliminer. Tout est fait pour attiser et perpétuer les potentiels agressifs de domination.
Bien sûr dans le jeu on ne détruit pas lʼautre pour de vrai … on se contente de détruire ce qui représente lʼautre. En fait cʼest pareil, mais quelque peu hypocrite. On sʼentraîne à dominer, détruire, posséder, bref, tout ce qui fait la joie de nos sociétés dites civilisées. Quelques jeux diffèrent cependant, parce que liés à une autre philosophie, tel le jeu de go qui consiste quand même à neutraliser lʼadversaire, mais sans le détruire.

Pourquoi évoquer cela ? Pour condamner le jeu ? Pour en dénoncer les dangers ? Mais que faire alors ? Empêcher les enfants de jouer alors que lʼon sait que le jeu est chevillé à lʼinstinct humain ? Nous devrons nous poser la question du jeu autrement.

Comment marier lʼinstinct ludique et lʼéthique ?

Peut-on encore inventer des jeux ? Je dis inventer et non pas reproduire des modèles anciens à lʼaune de la technologie actuelle ….
Un suisse, Blaise Müller,  a trouvé réponse à cette interrogation, à partir dʼun jeu appelé le Quarto.
En quoi consiste le Quarto et en quoi est-il révolutionnaire ?
Le terrain de jeu du quarto est un plateau de 16 cases. La numérologie est intéressante. Vous savez que monter un nombre à son carré lui confère une perfection de dédoublement. Le 2 de la force vitale (yin et yang) monté à son carré 4, donne la perfection de la manifestation matérielle de la terre. 16, cʼest 4 fois 4, donc un ajout de perfection. 16 cʼest aussi 2 (de la force vitale) que multiplie 8. Huit étant le nombre intermédiaire des cycles dénaires (terrestre) et duodénaire (céleste).
Bref, sans le savoir ou en le sachant, lʼauteur a choisi un plateau de 16 cases. Les joueurs disposent de 16 pièces ayant des ressemblances en couleur, taille, forme ou densité. Le but du jeu est dʼaligner 4 pièces ayant une caractéristique commune, à savoir grande ou petite, claire ou foncée, ronde ou carrée, pleine ou creuse.
Vous me direz, cʼest un jeu comme un autre, et que le meilleur gagne ! Mais cʼest là quʼintervient une différence de taille ! Une énorme différence ! En effet, le premier joueur (qui est tiré au sort), choisit une première pièce, et la donne à son adversaire pour quʼil le joue, et ainsi de suite. En dʼautre terme, dans ce jeu on ne joue pas CONTRE lʼautre, mais AVEC lʼautre. Les joueurs sont amenés à intégrer lʼautre dans leur propre jeu, non plus comme un adversaire mais comme un coéquipier. Cela développe dʼintégrer lʼautre à son propre point de vue. Si je gagne cʼest grâce et à lui (qui me fournit les pièces) et à moi (qui choisit où les mettre). Et si je perd, jʼai quand même participé activement à la victoire de celui qui est en quelque sorte mon coéquipier. Vous voyez le niveau éthique de ce jeu. Preuve que lʼêtre humain est capable de créer des conditions favorables à lʼharmonie quand il le postule avec le coeur.photo-59

Et pour ceux qui ont pour métier de soigner, je conseille de considérer la “maladie” comme un partenaire et non comme un adversaire. Toute une autre philosophie partagée aussi par l’hygiénisme.